MARC THIEBAUD et JULIEN RUSS

« Réussir est devenu l’obsession générale dans notre société, et cette réussite est mesurée par notre capacité à l’emporter dans des compétitions permanentes. Il est pourtant clair que la principale performance de chacun est sa capacité à participer à l’intelligence collective, à mettre en sourdine son « je » et à s’insérer dans le « nous », celui-ci étant plus riche que la somme des « je » dans laquelle l’attitude compétitive enferme chacun ; le drame de l’école est d’être contaminée par une attitude de lutte permanente, qui est à l’opposé de sa finalité. »

Albert Jacquard

Des défis multiples

Un des lieux où la coopération est de mise, c’est dans nos écoles. Les élèves ont besoin de développer des dynamiques coopératives dans les classes pendant les cours, comme dans le préau durant les récréations ou sur le chemin de l’école et sur les réseaux sociaux. La coopération n’est pas une branche inscrite au programme au même titre que les maths, le français ou l’histoire, mais elle fait partie des compétences transversales reconnues dans les plans d’étude, à apprendre tout au long du cursus scolaire. On constate que la coopération nécessite une véritable formation qui permette aux élèves d’en acquérir les principes de base et de s’y entrainer.

Face à cet enjeu, les personnes entourant les élèves à l’école ont un rôle exigeant, mais important à jouer, à deux titres au moins : pour contribuer à l’apprentissage de la coopération et pour favoriser le vivre ensemble. Les enseignant.e.s peuvent concevoir leur enseignement avec des pratiques coopératives en petits groupes et donner des outils pour apprendre à mener un travail en équipe. Ils et elles peuvent prendre soin du climat de classe, valoriser au quotidien la coopération et proposer des activités spécifiques à cet effet. Les médiateurs quant à eux peuvent accompagner la résolution de tensions relationnelles entre des camarades d’une même classe. Un.e psychologue scolaire peut accueillir un élève qui a besoin de soutien pour s’impliquer dans la dynamique du groupe. Un éducateur en milieu scolaire peut proposer des activités qui suscitent de la cohésion autour d’un projet commun pour la classe.

Au niveau des adultes, le développement de la coopération est tout aussi important. La cohérence dans l’établissement scolaire est à l’évidence nécessaire, dans ce domaine comme dans d’autres. Les enseignant.e.s, les équipes pédagogiques, les intervenant.e.s spécialisé.e.s peuvent acquérir les ressources pour des collaborations efficaces. La direction d’école peut étoffer sa capacité de travail en équipe et valoriser dans l’école les dynamiques collectives, dans une perspective d’interdépendance qui dépasse des représentations individualistes de l’enseignement qui appartiennent au passé.

Coopérer, ça s’apprend ! Est-ce que l’école peut intégrer cet apprentissage, à l’heure actuelle où elle fait face à tant de problèmes, alors que cela serait tellement nécessaire ? L’idéal serait que la coopération ne soit pas seulement un des défis à relever pour que l’école fonctionne, mais aussi une occasion de transmettre à la jeune génération des compétences et des outils qui les équipent pour leur avenir… et ouvrent des perspectives de solutions nouvelles dont le monde a tant besoin.

Des études, des ressources, des références

De nombreux écrits sont disponibles pour éclairer les pratiques qui peuvent être développées à l’école. Ils concernent les activités à but spécifique d’apprentissage de la coopération par les élèves comme les moyens de contribuer de manière plus générale à l’entraide et à des dynamiques relationnelles positives à l’école.

Pour quelques liens, voir : https://www.cooperer.org/ressources/#ecole

Certains auteurs ont par ailleurs défini les particularités de la coopération dans les apprentissages, en faisant la distinction par rapport à une tâche purement productive.
Voir à ce sujet  : collaborer ou coopérer pour développer des apprentissages ?

En Suisse romande

Chaque canton met à disposition des professionnel.le.s des écoles de nombreuses ressources pour le développement des compétences sociales, de la coopération et du vivre ensemble à l’école (voir : https://www.climatscolaire.ch/adresses).

Une brochure « mieux vivre ensemble à l’école » présente des démarches, des réflexions et des exemples d’activités pratiques regroupées en 16 chapitres (voir https://www.climatscolaire.ch).

Les intervenant.e.s de l’association D’ECOLE (https://decole.ch) proposent des interventions auprès des élèves et des professionnel.le.s de l’école pour construire une dynamique relationnelle positive dans les classe. Ils et elles conduisent des animations dans les classes avec des jeux et défis qui invitent à la coopération, puis suscitent des échanges qui mettent en valeur ce qui vient d’être vécu. Ils et elles transmettent également des outils pratiques aux enseignant.e.s pour soutenir leurs efforts de développement d’une cohésion et d’une entraide dans les classes.

L’association D’ECOLE a conçu de nombreuses activités pour ses interventions et elle utilise entre autres le modèle du tétraèdre de la coopération et les questions proposées pour aider à prendre du recul sur la coopération.