Utilisation

 

Dans les séances de travail, les approches traditionnelles sont souvent peu productives, limitées par la place excessive de l’argumentation et de la critique. La méthode des six chapeaux permet de travailler ensemble, dans la même direction, en valorisant une réflexion selon différentes perspectives.

Elle peut être utilisée dans différentes démarches, à divers moments, lorsqu’il s’agit de faciliter les échanges. Il suffit d’un petit temps d’exercice pour s’approprier la méthode et en percevoir les avantages. Les notions sont aisées à comprendre et il est assez facile de passer d’un chapeau à l’autre en conscience.

Selon de Bono, le fait de parler de chapeaux et de couleurs plutôt que de modes de pensée facilite la mise en œuvre de la méthode. Il propose donc d’utiliser des chapeaux réels en séance. On peut aussi faire avec des cartes de couleur. Pour éviter des caricatures, Il est utile de rappeler que les chapeaux sont des modes de pensée courants, non des étiquettes ou des catégories de personnes.

Il n’est pas nécessaire de mobiliser l’ensemble des six chapeaux à chaque fois, on peut choisir les chapeaux jugés pertinents. L’intérêt de la méthode consiste à ajuster le choix des modes de pensée sollicités en fonction de chaque étape de la démarche mise en œuvre. Par exemple, dans la gestion d’un problème, on peut commencer par un partage des éléments factuels, puis des ressentis avant de faire appel à des propositions d’idées, etc.

 

Variations

 

La méthode des six chapeaux peut être utilisée dans des formations pour entraîner la conscientisation des registres de communication.

Parfois, il peut s’avérer utile de solliciter d’autres modes de pensée que les six proposés par de Bono. Par exemple, un groupe a besoin d’identifier en commun des critères avant de prendre une décision. La réflexion sur des critères peut être considérée comme un mode de pensée complémentaire.

La méthode peut être utilisée avec d’autres grilles de lecture : par exemple, on peut analyser avec le prisme des chapeaux une situation sous des aspects relevant de l’individuel, des relations, du groupe, de l’environnement, etc.

 


 

Ressources

 

Référence bibliographique

De Bono, E. (2005). Les six chapeaux de la réflexion. Paris : Eyrolles.

 

Liens internet

Six chapeaux pour penser et un dispositif pédagogique par Catherine Legros
https://diotime.lafabriquephilosophique.be/numeros/017/070/

Marie-Hélène Gros  et Monique Wach, « La méthode des six chapeaux d’Edward de Bono appliquée à la décision en orientation », L’orientation scolaire et professionnelle
http://journals.openedition.org/osp/4739

Les six chapeaux de la réflexion. Résumé
https://www.clps-bw.be/publications/productions/Fiches_six_chapeaux.pdf

 

Six chapeaux de pensée selon Edward de Bono    

Buts et principe général de la méthode

Dans les séances de travail, les approches traditionnelles sont souvent peu productives, limitées notamment par la place excessive prise par l’argumentation et la critique (pensée « réactive »). Edward de Bono a développé une méthode de pensée dite « parallèle » pour dépasser ces écueils. Elle permet d’organiser la réflexion selon six points de vue – ou modes de pensée – symbolisés par des chapeaux de couleurs différentes.

La clé de la méthode consiste à demander aux participant.e.s de s’exprimer successivement, tous ensemble, dans le même chapeau de pensée. Cela permet de cheminer de concert dans la réflexion. Les six chapeaux peuvent être tous… ou quasiment tous… sollicités dans le cours d’une séance.

La méthode comporte plusieurs avantages.

  • En premier lieu, elle valorise une réflexion sous différentes perspectives, qui est bien souvent nécessaire, notamment pour analyser ou envisager plusieurs scénarios avant une prise de décision.
  • Cette méthode permet de travailler ensemble, dans la même direction, ce qui évite la confusion dans les échanges et accroît la qualité de la réflexion. Comme le dit de Bono : « Jongler avec six balles est difficile. Lancer une seule balle, c’est incontestablement plus simple » (de Bono, 2005, 23).
  • Elle permet de reconnaître la valeur de chaque apport, pour peu qu’il soit fait au bon moment.
  • On évite les polémiques et les redondances qui se manifestent fréquemment lors des séances de travail.
  • La méthode aide à focaliser la communication et limite les paroles centrées sur soi (rééquilibrage de la place du « moi » et du « nous »).
  • Le résultat est souvent bien accepté, car chacun.e a participé activement au processus décisionnel et peut donc s’identifier à ce résultat.

Les éléments retenus pour les six chapeaux sont aisés à comprendre et il s’avère assez facile de passer de l’un à l’autre en conscience. Cette capacité à penser avec souplesse est très utile pour la qualité de la réflexion collective.

Les chapeaux (= modes de pensée) proposés par E. de Bono correspondent à six registres proposés par les cartes « communication » (les cartes numérotées 1 à 6). Les couleurs des cartes correspondent exactement à la couleur des chapeaux.

 

La méthode des six chapeaux de la pensée en résumé

Chapeau blanc
Les faits

S’en tient aux faits, donne des informations avec un maximum d’impartialité et d’objectivité.

Chapeau rouge
Les émotions

Exprime sentiments, émotions, intuitions, pressentiments, impressions (vécus ici et maintenant).

Chapeau vert
La créativité

Manifeste une pensée créatrice, des idées, perceptions et concepts nouveaux.
Libère du carcan des idées reçues pour créer de nouvelles perspectives au-delà des schémas établis. Formule parfois des paroles provocantes et illogiques.

Chapeau jaune
Les avantages

Exprime une pensée optimiste et des évaluations positives.
Couvre la palette positive allant du logique et du pratique aux rêves et aux espoirs.

Chapeau noir
Les risques, les inconvénients

Exprime ce qui cloche, des évaluations négatives. Présente des raisons logiques et pertinentes qui soulignent ce qui est incorrect et erroné, apporte le point de vue pessimiste et critique, évalue les risques d’échecs possibles.

Chapeau bleu
La prise de recul

Est chef d’orchestre, établit le plan de réflexion, dirige et organise l’utilisation des différents chapeaux.
Prend du recul, met en perspective, synthétise les réflexions.

 

Utilisation

Selon E. de Bono, le fait de parler de chapeaux et de couleurs plutôt que de modes de pensée facilite la mise en œuvre de la méthode. Il propose donc d’utiliser des chapeaux réels en séance pour inviter les personnes dans le collectif à s’exprimer dans un monde de pensée défini.

Les cartes peuvent être utilisées de la même manière, avec la symbolique de leur couleur. Une carte choisie peut être posée par exemple sur la table au moment d’inviter le groupe à s’exprimer.

Parfois, d’autres modes de pensée peuvent s’avérer utiles que les six proposés par E. de Bono. C’est une limite de sa méthode, qui a cependant l’avantage de la simplicité. Par exemple, il peut s’avérer nécessaire d’analyser, d’explorer, de chercher à comprendre les tenants et aboutissants d’une situation. Dans ce cas, on pourra utiliser la carte no 25 « Analyse » (voir cartes « Communication« ). Ou il peut être important de faire converger l’attention du groupe vers l’identification de critères avant de prendre une décision. On pourra alors utiliser la carte no 26 « Critère ». Etc.

 

Suggestions d’activités

A) Pour conscientiser et s’approprier la méthode des six chapeaux
Individuellement :

On peut utiliser les cartes no 1 à 6 pour apprendre à repérer les modes de pensée mobilisés. Cela peut se faire durant l’observation d’une réunion ou après celle-ci, à travers un retour réflexif. Il est également possible d’enregistrer un moment de réunion pour y revenir ensuite.

Il peut être intéressant d’identifier des préférences, des tendances dans la mise en œuvre de certains modes de pensée selon les situations.

En collectif :

Pour expliquer la méthode au sein d’un groupe, il est utile de prévoir une activité spécifique. Le but de l’activité proposée ci-après consiste dans un premier temps à démontrer que la coexistence de différentes manières de penser peut nuire considérablement à l’efficacité du travail de groupe. D’où l’intérêt de la méthode proposée par E. de Bono. La personne chargée de l’animation va donc inviter le groupe à une mise en situation sous la forme d’une prise de décision collective (par exemple choisir l’utilisation d’un don reçu par un mécène). On peut procéder selon les étapes suivantes :

  • Pour commencer, il s’agit de clarifier l’objectif du jeu de rôle qui s’ensuivra : permettre de nommer six modes de réflexion présents dans des échanges en groupe et percevoir leur impact sur l’efficacité du travail collectif.
  • Afin que chacun.e sache bien ce que recouvrent les chapeaux avant le jeu de rôle, la personne chargée de l’animation porte successivement un chapeau après l’autre en jouant le mode de pensée correspondant. Elle invite le groupe à nommer la caractéristique de chacun des chapeaux afin que tout le monde soit au clair et puisse ensuite jouer avec chaque chapeau. Elle peut distribuer une feuille qui synthétise les éléments de la méthode, ce qui facilitera une intervention adéquate de chacun.e durant le jeu de rôle.
  • L’activité est ensuite expliquée (contexte et décision à prendre par le collectif) et chaque personne reçoit un chapeau d’une couleur différente.
  • Le groupe commence à échanger. Toutes les deux minutes, les chapeaux tournent dans le sens des aiguilles d’une montre… jusqu’à ce que chaque personne ait reçu tous les chapeaux.
  • Lorsque chacun.e a porté chaque chapeau durant deux minutes, les acteurs et actrices sont invité.e.s à s’exprimer : « dans quel-s chapeau-x ils et elles étaient à l’aise ou pas… ». Cela permet à chaque participant.e d’identifier ses chapeaux – modes de pensée préférentiels. Si la taille du groupe le permet, on peut prévoir des observateurs.trices qui repèrent les manières d’intervenir pour les différents chapeaux des acteurs et actrices et peuvent leur apporter leur feedback
    (en lien avec la pertinence des interventions faites dans les différents chapeaux).
  • Le groupe entier s’exprime ensuite sur ce que cela a produit : l’impossibilité de s’accorder… et de progresser dans une réflexion collective ! Les raisons de la contreperformance sont discutées et le groupe identifie des moyens permettant une meilleure efficacité (par exemple en précisant la chronologie d’intervention des différents chapeaux).
  • Puis on propose de faire le même travail en invitant les participant.e.s à intervenir toujours ensemble dans un même mode de pensée ! Après une quinzaine de minutes, le groupe partage ses réflexions sur le déroulement de cette deuxième séquence de réflexion collective. On constate que lorsque le groupe pense à l’unisson et que les chapeaux interviennent alternativement plutôt que simultanément, les tensions s’apaisent et l’efficacité croît !

NB. On observe parfois dans cet exercice que des participant.e.s ne sont encore pas au clair sur les caractéristiques d’un ou l’autre chapeau. Ils ou elles diront par exemple

  • avec le chapeau rouge : « c’est nul » (noir) ou « c’est génial » (jaune)
  • avec le chapeau blanc : « c’est une bonne idée » (jaune)

Il y a lieu de bien cerner les nuances et de repréciser ce qui caractérise chaque couleur.

 

B) Pour développer de manière structurée une démarche collective
(par exemple pour la gestion d’un problème)

Dans la préparation d’une séance de travail et dans la facilitation de celle-ci, les différents modes de pensée peuvent être sollicités de manière à optimiser le travail collectif.

Ainsi, dans une démarche de gestion de problème (voir cooperer.org/demarches, démarche 12), les couleurs suivantes peuvent être mobilisées successivement (c’est une manière de faire parmi d’autres) :

Carte no 1 : fait « objectivé ». Chaque personne est invitée à s’exprimer sur l’information dont on dispose, les observations récoltées… qu’est-ce qui fait problème ? dans quel environnement ?

Carte no 2 : ressenti, émotion. Comment le problème est-il perçu, vécu par chaque personne ?

Carte no 3 : idée nouvelle. Chaque personne fait des propositions, apporte des pistes de solution, de manière créative. Aucun commentaire, aucune évaluation n’est acceptée.

Carte no 4 : avis positif. Chacun.e énumère les avantages qu’il ou elle voit aux propositions énoncées.

Carte 5 : avis négatif. Chacun.e énumère les risques les inconvénients des propositions.

Carte no 6 : métaréflexion. Le groupe fait la synthèse en prenant du recul, éventuellement en regroupant des propositions par domaines ou en les retravaillant.

Une décision peut ensuite être prise concernant la suite à donner.

Le groupe peut faire un bilan de son travail collectif, par exemple en utilisant à nouveau la carte no 2 pour un partage des ressentis (ce qui permet de valider le processus suivi… ou d’entendre une éventuelle frustration déception concernant l’échange vécu).

Dans d’autres démarches (par exemple négociation, analyse de pratiques en groupe, etc.), les cartes pourront être utilisées différemment (dans une proportion et un ordre variable).

 


C) Pour partager les réflexions sous différents angles de vue sur un objet défini
(qui peut être un projet, une méthode, un outil, un problème, un thème, une proposition, etc.)

Dans ce déroulement, une idée, une proposition, une solution est déjà identifiée et le principe consiste à l’étudier dans la perspective de chacun des six modes de pensée proposés par E. de Bono. La personne chargée de l’animation invite le groupe à mettre en commun les différentes perceptions en mobilisant successivement différents chapeaux de couleur avec les questions ci-après.

Dans un petit groupe, le partage des perceptions peut se faire à chaque étape par un simple tour de table. Il peut être intéressant d’avoir une prise de notes de ce qui est exprimé.

Dans un plus grand groupe, il est possible par exemple de préparer cinq panneaux (un pour chacune des cinq premières couleurs) et d’inviter les participant.e.s à écrire leurs contributions successivement sur chacun d’eux. Puis on ira prendre connaissance de toutes les productions avant qu’une synthèse soit faite par le groupe (ou deux ou trois personnes désignées) et qu’une éventuelle décision soit prise sur la suite à y donner.

Par ailleurs, il peut être utile de donner une feuille avec les questions (voir page précédente) pour que chaque personne fasse une réflexion individuelle préalable.